A 40 ans et tous ses cheveux, look d’aventurier malgré sa récente barbe hélas rasée, celle qui était toute droite sortie d’un » very bad trip », Le Normand Barnabé Moulin, actuellement sur le Tour de France avec le Team Astana, en a vécu quelques vies. Le bourlingueur qu’il est en a rencontré des cultures, écumé quelques mers et continents. Avant d’arriver dans le milieu du cyclisme comme ostéopathe, il a gardé son cap et tracé son chemin d’éternel passionné sur différentes aventures, il en a vécu des moments forts le « balbuzard », comme la plongée sous marine. Découvrant le fond des mers à la poursuite de traces de vie, du passé, planant au fond de l’océan ou se faufilant dans les méandres obscures de galeries souterraines avant de remonter doucement à la surface pour rejoindre la terre ferme et les siens. Avec toujours la même devise, apprendre pour s’enrichir encore et encore auprès d’eux, de ces différentes scènes que la vie nous offre, « go your own way » comme le dirait Fleetwood Mac !
Pas le genre de bonhomme flanqué d’un « natural blues », mais plutôt un amoureux de la vie, de rencontres humaines au gré des jours, en mettant bien au chaud celles qui les font ‘triper’, tout en gardant soin de ranger dans le coin de son cerveau celles qui les ont déçu. La langue de bois n’est pas son fort, un peu comme certains coureurs d’une autre époque qu’il admirait tant étant gosse le long des routes, comme Bernard Hinault, né le même jour que lui . Son esprit, ses coups de cœurs, ses coups de gueules sont aussi intenses les uns que les autres, mais ils sont surtout estampillés par la marque de la liberté, celle qui l’a fait vivre depuis ses premiers pas.
Ce n’est pas vraiment alors un hasard de le retrouver au sein du team Astana, à « retaper la mécanique humaine » comme il aime à le dire. Après des études à Toulouse et au pays de sa majesté, il est revenu posé ses valises en Bretagne, autre pays de grands voyageurs. Il a juste vissé la pancarte de son cabinet à Pontivy et l’histoire a fait le reste. Lorsque l’on s’avance du bus « Azure » du team Astana, on peut alors entendre un « Comment qu’c’est!!! » avec l’accent bien de chez nous,, cash et sincère, on vous l’a dit « go your own way « !
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Comment êtes vous arrivé dans le monde du vélo ?
Barnabé Moulin: » En fin de compte, ce n’est pas un hasard comme on le dit souvent. j’avais fait des études d’ostéopathie en France et en Angleterre. Des belles années et de belles rencontres comme avec notamment avec l’un de mes professeurs Serge Paoletti qui était justement l’ostéopathe du team Astana, mais je n’avais pas encore l’idée de faire ce job au sein du team Kazakh. En fait, je suis arrivé en 1999 en Bretagne comme kinésithérapeute et j’ai démarré mon activité d’ostéopathe en 2005 exclusivement, je me suis vraiment installé mais le vélo était rangé au fond de mon garage, et au fond de ma tête.
Un jour, je soigne le corps du Champion Breton Warren Barguil suite à une chute, le lendemain Warren claquait son étape. Du coup, c’est remonté aux oreilles de mon ancien prof qui était chez Astana. Il m’a appelé et j’ai débarqué au sein du team. Depuis, on ne s’est pas quitté et on se partage le travail. »
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Justement, qu’est ce que le métier d’ostéopathe au sein d’Astana ?
B.M: » (Rires). Il y a les mécaniciens qui retapent les vélos, les préparent pour la prochaine épreuve, et moi je retape l’homme. Le soir après la bataille, je m’occupe de quelques coureurs. Ca me prend de vingt minutes à une heure par homme, suivant sa morphologie, les efforts fournis et ses blessures. Et comme nous ne sommes que juste lui et moi dans cette pièce, on se parle de tout et de rien. On se raconte nos histoires, leurs moment de blues, nos familles qui sont restés au pays. C’est aussi un métier d’écoute et ca aide pour réparer et préparer le corps, on connait chaque coureur et ce dont il a besoin. »
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Comment est l’ambiance du team ?
B.M: « Astana a beau être une des plus grandes équipes du Monde, c’est surtout un bande copains. Le « melting-pot » en fait sa richesse et on a tout à gagner dans les échanges. Ne serait-ce que d’apprendre et pratiquer les langues (italien, anglais, russe, espagnol, flamand,…). On sent cette esprit sur toutes les courses, c’est vraiment l’amitié qui prime contrairement à certaines équipes où la hiérarchie empêche un peu ce genre de liens entre les coureurs. Parfois je me permets de rouler avec eux durant les étapes de repos. Mais je ne veux jamais les déranger, je leurs demande et ils acceptent généralement. Bon, je roule 2 h max mais j’en chie bien et c’est toujours un excellent moments entre potes. Certains coureurs ont même pensé que Dan Craven avait signé chez Astana ou que Fabio s’était laissé poussé la barbe (rires) quand j’avais la barbe! C’est ça l’esprit d’Astana. »
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Comment expliquez vous qu’il y ait si peu de Français dans les équipes étrangères, vous qui travaillez pour un team étranger?
B.M: « On a un vrai problème en France, on pense que l’on a la science infuse, que c’est nous qui détenons la vérité et que les autres c’est de la flûte ou des tricheurs. On se regarde le nombril et on se complait à camper sur cette position. Pour l’instant, ca ne marche pas trop puisque le dernier vainqueur du Tour se nomme Bernard Hinault, c’était en 1985.
Il y a des supers jeunes en France qui ont le potentiel pour devenir les meilleurs mondiaux mais on ne leur fait pas confiance. On ne leur donne pas l’occasion non plus. Avec les équipes étrangères, c’est le contraire, on leur donne cette confiance, on leur demande d’attaquer et ne pas attendre. Ce n’est pas un hasard si les meilleurs Français se sont épanouis avec des teams étrangers. Du coup, le jeune coureur Français n’a pas envie de venir car on lui raconte tant de bêtises sur les teams étrangers. Et en plus, c’est très particulier d’engager un Français, c’est des tonnes de paperasses bien de chez nous à régler. J’espère que cela changera avec le temps. »
Nibali a perdu du temps sur le général, vent de panique au sein d’Astana?
B.M: » Non, pas du tout. Vincenzo sort d’un Giro qu’il a remporté. Il récupère tranquille. Sur le Tour c’est Aru le leader, place au autres, c’est ce qui était décidé dès le début. Vincenzo va bien, très bien et on va le revoir bientôt aux avants postes
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Vos meilleurs souvenirs avec Astana ?
B.M: « Ouch! Il y en a plein, c’est tellement de souvenirs ces années avec le team. On peut dire les victoires de Vicenzo sur le Tour de France, où celle de Landa hier avec le maillot rouge de Fabio dans la foulée, ça ce sont des sacrés souvenirs surtout après l’éviction de Vincenzo. Ca avait une saveur particulière (rires). Mais les plus beaux souvenirs sont encore à venir, sur les prochaines victoires. »
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Le pire ?
B.M: « Comme disait un prof que j’avais en Angleterre, les mauvais souvenirs c’est comme les virus en informatique, on les mets en quarantaine. »
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Vous roulez aussi au sein de team De la Baie
B.M: « (Rires), oui, en Pass cyclisme, attention !! J’aime le vélo, je le pratiquais dans ma jeunesse. J’étais pas trop mal, j’en ai claqué quelques unes et j’ai rangé mon vélo un jour. Il y a peu de temps, je me suis remis dessus et c’est reparti. Je fais ça pour le plaisir, et sur les courses c’est vraiment un moment d’éclate entre potes. »