Quand les jeunes talents Gabriel Berg et Cormac Nisbet (Soudal Quick Step Devo) ont expliqué les raisons d’abandonner le cyclisme pro, le recrutement de coureurs de plus en plus jeunes a fait débat. À seulement 18 ans, le style de vie déjà requis pour devenir un coureur de haut niveau est quelque chose de tout simplement très difficile à atteindre, et peu de gens y parviennent.
Johan Molly, recruteur Quick-Step, à Sporza.
« Gabriël ne dit rien de mal dans cette interview. Il dit les choses comme elles sont. Dix-huit ans est aussi un âge charnière. Il faut en faire toujours plus pour y arriver et, surtout, renoncer toujours plus. Il faut être capable d’accepter tout ça pour changer de vie. C’est peut-être aussi la différence entre un champion et les garçons qui le sont juste un peu moins. Il faut être fort dans sa tête »
Depuis Remco Evenepoel ou Tadej Pogacar tous deux vainqueurs en worldtour très jeunes, toutes les équipes essaient de recruter les meilleurs talents le plus tôt possible. Dans certains cas, des jeunes de 18 ans sont même recrutés directement depuis les rangs juniors pour arriver dans le World Tour.
« Vous ne pouvez pas imaginer le nombre d’e-mails et de messages que je reçois de parents qui voient « quelque chose » chez leur fils. Il a juste besoin de s’épanouir. Après tout, tout le monde veut le meilleur pour ses enfants. Chaque année, j’invite quelques nouveaux venus à une journée d’essai dans ma région. Il y a trois ans, j’ai fait la même chose avec Jasper Schoofs (qui a remporté l’argent dans le contre-la-montre junior aux derniers Championnats du monde). Mais son père a dit : « Je veux épargner mon fils de ça, je ne veux pas encore lui mettre trop de pression. »
Nous avons une équipe junior, mais nous ne leur mettons volontairement aucune pression. Les parents peuvent souvent jouer un rôle s’ils croient que leur fils peut devenir professionnel. Je vais voir les courses de jeunes partout en Europe. Jamais auparavant il n’y avait eu autant de recruteurs et d’agents sur les courses », Il y a des garçons de 16 ans qui ont déjà un agent. Ils se moquent d’eux en leur disant qu’ils peuvent gagner 200 000 euros en junior. Ils les rendent fous. Et en tant que recruteur, je dois faire face à ça
Du coup, les jeunes se mettent aussi la pression. Quand j’entends certains gars, ils veulent recommencer à s’entraîner en novembre. Alors que la première compétition n’a lieu qu’en mars ! Ils sont tellement motivés qu’il faut parfois les ralentir et garder les pieds sur terre. »
La réaction de l’agent quand Cormac Nisbet a annoncé son retrait a été des plus surprenantes pour le recruteur Belge. L’agent en question ne s’occupait plus de Nisbet, ce dernier était déjà oublié.
« Quand Cormac Nisbet a annoncé qu’il allait arrêter, son agent nous a immédiatement envoyé un mail avec 3 nouveaux noms de coureurs qui pourraient prendre la place vacante. Il ne se souciait plus de Cormac. Ces agents là veulent que leurs coureurs deviennent professionnels le plus vite possible. Je pense que Berg et Nisbet ne sont pas les derniers jeunes coureurs à abandonner. Nous allons également rencontrer ce problème avec nos coureurs belges ».