Bruno Cornillet, 53 ans, est l’une des figures emblématiques du cyclisme Breton. Lui l’équipier modèle de Bernard Hinault sous la Vie Claire puis de Greg Lemond sous le team « Z » en a fait des beaux podiums. Souvenez vous; Vainqueur du GP de Plouay en 1990, général du Tour de Valence en 84, vainqueur d’étape sur le Dauphiné en 87; étape sur Paris Nice en 89, vainqueur du Tour de Vendée en 92, du circuit de la Sarthe en 91, étape sur la Nissan Classic, 14ème du Tour de France 89, 10 ème du Giro 92, des tops 10 sur les plus belles classiques comme sur Liège Bastogne Liège ou l’Amstel Gold Race. Bref, peu de coureurs frenchies peuvent se vanter d’avoir ce palmarès à l’heure actuelle.
Le bonhomme avait un autre rêve, celui de devenir pilote d’avion. Sous les paroles de Jacques Brel, il le devint. Il est maintenant pilote de ligne dans la compagnie « Hop » filiale du groupe Air France. Peu de passagers savent que c’est un ancien champion cycliste qui les pilotent à plus de 7000 mètres d’altitude.
Ce week-end le Breton a reçu le prix de la reconversion masculine à La Toussuire par les groupes CDES (Centre de Droit et d’économie du sport) de Limoges, les mutuelles Intériale, Riskeo et MG Sports. C’est Astrid Guyart l’escrimeuse double médaille d’or en coupe du Monde devenu ingénieure aéronautique qui l’a reçue chez les féminines.
« Le talent ça n’existe pas, le talent c’est d’avoir envie de faire quelque chose! »
Bruno Cornillet; » C’était un beau week-end, à la neige qui plus est dans cette belle station de ski. Ce prix, je suis flatté, mais cela m’a fait drôle de le recevoir. Je ne suis pas le seul qui va jusqu’au bout de ses rêves dans sa reconversion. J’ai pensé à des amis cyclistes comme Vincent Lavenu avec qui j’ai roulé en pro et dans le team Chazal. Il a monté depuis l’une des plus belles équipes du monde avec AG2R et aussi des gars comme Joël Pelier. Joël par exemple voulait devenir artiste sculpteur. Ce n’est pas évident d’en vivre mais il y a été quand même. Il n’a pas eu peur malgré la difficulté comme quand il était coureur. C’est aussi une belle reconversion celle de Joël non? Il vit de son art et elles sont magnifiques ces sculptures. Je ne mérite pas ce prix plus qu’un autre, des gars comme Joêl dans l’art ou Vincent dans le cyclisme, Théo De Rooij dont j’ai un très bon souvenir qui est maintenant dans le business et le cyclisme Néerlandais, Moser dans la vigne ou Paul Kimmage dans le journalisme et tant d’autres qui ont eux aussi été au bout de leurs rêves. nous sommes nombreux dans ce cas là. J’ai pensé beaucoup à eux, ce prix c’est pour nous tous aussi dans cette famille cycliste. «
De champion à pilote de ligne, drôle de parcours non ?
Bruno Cornillet; » Un drôle de parcours effectivement. Au début, quand j’étais un tout jeune gamin, je voulais faire pilote d’avion. C’était vraiment mon rêve d’enfant mais il faut faire de longues études. Et j’ai croisé le vélo sur mon chemin de gosse. A l’adolescence, je m’y suis mis comme un peu tous les jeunes Bretons, et j’ai découvert que cette machine avançait toute seule quand je me mettais dessus. Du coup, j’ai pédalé et pédalé encore et j’ai vu qu’elle allait de plus en plus en vite avec moi. De fil en aiguille, je me suis entraîné pour aller encore plus vite, tout comme disait Jacques Brel: « Le talent ça n’existe pas, le talent c’est d’avoir envie de faire quelque chose! ». J’en avais vraiment envie justement et je me suis dirigé vers la carrière de coursier. Les résultats scolaires s’en sont fait ressentir et donc j’ai mis entre parenthèse mon rêve de pilote (rires). A 20 ans, je suis passé pro à « La Vie Claire » mais j’avais toujours mon petit avion qui vrombissait dans le coin de ma tête. Je savais que la carrière de cycliste est assez aléatoire, si on est pas assez durement préparé on peut dire au revoir à ce rêve. Alors, je préparais déjà mes études en parallèle. A 26 ans, je me suis vraiment investi pour passer mon brevet de pilote à Brest. Avec l’aide de quelques personnes dont Hubert Josselin et Roland Pencran, j’ai pu travailler mon brevet sereinement . Mais le vélo restait toujours prioritaire, j’étais pro, passionné par ce sport et des obligations à mes sponsors. Du coup, je bossais dur, je dormais peu à cette époque là! En 1993, je devient pilote pro et en 97, je commence ma carrière de pilote après 12 ans comme cycliste pro. Le secret: le dicton de Jacques Brel qui résonne toujours dans ma tête, et le travail, juste le travail. »
Vous suivez toujours le vélo?
Bruno Cornillet
; » Oui quand je peux. J’aime bien regarder nos jeunes champions tricolores qui vont se battre, ça me rappelle notre jeunesse. Vincent a su transmettre cette hargne aux gars de son équipe. Mais cela à beaucoup changé depuis les années 80-90. Les médias parfois sont assez durs avec nous. C’est dommage, car seule la cohésion et l’adhésion de tous peuvent faire perdurer ce sport. Il y a tant de jeunes qui le pratiquent et qui ont des rêves, ça serait bien d’arrêter de les détruire leurs rêves non? «